Un espace pour enseigner
Début de cours : Retour au calme par la respiration guidée
JE ME CONCENTRE (durée : 1 minute)
Exercice : Faites cet exercice quand vous avez besoin de vous concentrer, avant une activité par exemple.
Pendant 30 secondes, lisez le X en commençant par la barre qui va de haut en bas puis par celle qui part de bas en haut. Enfin pendant les 30 secondes suivantes fermez les yeux et essayez de lire le X comme s'il était inscrit à l'intérieur de vos paupières.

Salut Littéraire


Le salut littéraire a deux objectifs :

permettre aux élèves d’évacuer le monde extérieur et d’entrer dans l’enceinte du cours de français, paisiblement. Le rituel est attendu par les élèves. Ils savent que l’entrée en cours de français sera un moment reposant, silencieux, et d’écoute sans contrainte.

Faire un don aux élèves dans la mesure où rien ne doit leur être demandé suite à la lecture du texte. Ils peuvent donner (ou non) leurs impressions (en général ils le font avec plaisir). Aucune question de compréhension ou d’ordre analytique ne doit trahir ce moment de partage. C’est la règle ESSENTIELLE. La littérature doit pouvoir se savourer, sans qu’on la décortique.

• Les modalités du salut littéraire :

Afin que les élèves comprennent que ce moment n’est pas une sieste potentielle, un maintien corporel est sollicité. Les élèves doivent se tenir correctement et fermer les yeux. Ces recommandations ne sont pas anodines : le maintien corporel permet de garder le corps en éveil et donc d’en faire un réceptacle actif. Les paupières fermées rendent possible la coupure avec le monde purement scolaire et entraînent une attention accrue de l’ouïe. Le texte lu déploie alors toutes ses potentialités. Ces modalités d’application doivent être expliquées au préalable aux élèves.

Il est intéressant d’effectuer le tout premier salut littéraire au moyen d’un texte à la fois beau et interpellant. « Une Charogne » de Baudelaire est un bon début dans la mesure où il permet defaire comprendre aux élèves que seul le Verbe est à même de rendre le texte beau. Puisque le thème de la « charogne » n’a rien de poétique, il faut bien que la Beauté soit extraite de quelque part. La réaction des élèves à la lecture de ce texte est toujours la même : « c’est beau » / « c’est bizarre ». Ils saisissent donc d’emblée le décalage entre le contenu sémantique du poème (la description de la charogne) et la manière exceptionnelle avec laquelle ce thème est rendu.

Pour les lectures suivantes, il convient de faire en sorte de choisir des textes « colorés », c’est-à-dire des textes au sein desquels les images occupent une place éminente.
Ce sont donc souvent des textes poétiques : Baudelaire, Rimbaud (« Le bateau ivre »), Hugo, mais aussi Senghor (« Femme noire »), Cendrars, pour ne citer que quelques noms, sont intéressants pour les couleurs, les rythmes, les sonorités qu’ils proposent.
La prose peut aussi faire son effet. Mais il s’agit alors plus souvent de prose poétique (ex : Les rêveries du promeneur solitaire de Rousseau)
La prose enfin peut être intéressante. Mais il faut, si on la choisit, qu’elle délivre un sens immédiat. Autant la poésie parvient à pallier son hermétisme grâce à la beauté de son Verbe. Et dans ce cas, les élèves admettent de ne pas comprendre le texte, et savourent tout autant celui-ci. Autant avec la prose, l’élève réclame du sens pour savourer le texte.

Les élèves prennent ce rituel très au sérieux. Il s’agit à chaque fois de mettre l’accent sur la beauté du langage et sur l’impression que le texte leur a fait. Tout est fondé sur le ressenti : aucune lecture analytique ne doit venir peser sur cet instant privilégié de complicité entre le texte, sa mise en voix, le professeur et les élèves. De surcroît, ce rituel exerce un puissant attrait puisqu’il convoque des moyens ne mobilisant pas la volition de l’élève qui se trouve dès lors purement fasciné par le texte. Le salut littéraire est un vrai don musical qui n’attend rien en retour.

Sophie Cellarius

Posted by alder